Non, les "banlieues", c'est aussi une périphérie ordinaire des grandes villes, où "s'exilent" pour diverses raisons, cadre de vie, espaces verts ou pas, et naturellement pécuniaires, des gens venus habiter là pour cause de travail. Autant de destins, de chemins de vie, que d'individus, qui sans forcément en avoir conscience partagent par la force des choses tant de points communs.
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Parmi ces points communs, on retrouve "classiquement" celui de faire la gueule, entassés dans des transports en commun systématiquement saturés aux heures de "transhumance", autre conséquence de politiques crétines ayant conduit à la désertification de nos pourtant si belles campagnes profondes (que s'autorisent à dénigrer des milieux autoproclamés "supérieurs" s'autorisant à penser à la place des autres) pour des concentrations injustifiables d'entreprises, et donc de populations, dans d'horribles et horriblement chers mêmes mètres carrés, autour de villes s'auto-asphyxiant jusqu'à produire une autre forme de gangrène moderne, l'écolo-bobo. Comment encore juger pertinents tels entassements (qui contraignent en moyenne à plusieurs heures par jour passées à transhumer entre le travail et la tanière, rarement à proximité l'un de l'autre) au vu des moyens de communication électronique et des infrastructures de transport actuelles ??
Mais revenons à nos banlieusards, vu que c'en est l'appellation, ces gens qui souvent s'isolent à l'intérieur d'eux-mêmes pour se leurrer d'être moins encerclés par une foule compacte, au risque fréquent de dérive perverse qu'est le "tout-seul", l'individu qui ne voit plus que sa petite personne, ignorant totalement l'existence des autres au point de les bousculer, et leur aboyer dessus après, s'ils se rebiffent de ces micro-agressions. Coutumiers des petites incivilités par la force de l'habitude, par mimétisme, ou par répression, ils se mettent parfois seuls dans des situations qui les desservent, par exemple en s'agglutinant devant les portes des transports, empêchant de fait la descente, qui elle-même bloque la montée. Et ils pestent et ils râlent, surtout quand la mécanique de ces transports, à la limite de l'implosion, dysfonctionne, comme ce matin-là..
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La femme dont nous écoutons les pensées dans cette histoire n'a rien d'une Tatie Danielle, non, elle est juste une banlieusarde "ordinaire", qui nous fait partager le temps d'un voyage "sportif" les petits agacements qui entretiennent son niveau de stress au quotidien.
Ce matin-là, pourtant, un visage plutôt souriant, chose particulièrement inhabituelle, retiendra son attention..
( photos: afp )

Un Matin Banlieusard [Ch.01]
« C'est quoi encore, ce bazar, il est où ce foutu train de banlieue ? Ils nous font quoi, le premier affiché est dans plus d'une demi-heure, et évidemment pas de bandeau jaune pour nous expliquer. Font ch…
Allez, magne-toi de passer ton badge, toi devant, et surtout ne me tiens pas la porte, mal élevé ! J'aurais dû lui crier "Merci quand même", mais il a pas une tête à comprendre le message. Il a une tête de c…, il dépare pas parmi les autres. Et l'autre derrière, qui dit pas "Merci", j'aurais mieux fait de lui lâcher la porte dessus, en plus il me bouscule en fonçant sur le quai. A ce stade, c'est plus des baffes !
Bon, il dit quoi, l'affichage à l'intérieur ? Pff, pas mieux que celui dehors. Quelque part, ça se tient. Ca se tient, mais ça m'arrange pas, moi. Ils savent qu'il y a des gens qui veulent aller au boulot, ces $#@* ?? Regardez-moi cette faune sur le quai bondé, un bel échantillon représentatif ! Cui-là en plein chemin, qui tripote son téléphone pour lui dire qu'il est sur le quai. Dis-lui aussi que tu me gênes, blaireau. Mais t'as vu ce peuple ? Quand le train va arriver, s'il arrive un jour, comment tu veux faire rentrer tout ça dedans ??
Manquerait plus qu'il pleuve, vu ces gros nuages menaçants. Comme s'ils n'avaient pu prolonger le toit sur tout le quai, avec tout le fric qu'on leur laisse, avec nos abonnements qui ne cessent d'augmenter. C'est sûrement pas dans de nouveaux trains qu'ils l'investissent. J'voudrais bien voir la gueule de la baraque au patron !
Pourquoi il me pousse, l'autre, là ? T'es amoureux, ou quoi ? Va donc directement sur la voie, y'a pas encore le train… Nan, dis pas ça, il en serait capable, et ça nous retarderait encore davantage. Pff…
Turlututu, l'autre zouave va nous causer dans le micro… C'est quoi encore, la blague du jour ? "Mesdames, messieurs, votre attention s'il-vous-plaît…" Parce qu'il nous demande notre avis, le complice des preneurs d'otages ? Allez, le reste sera-t-il audible ?
"Aujourd'hui encore, un dérangement des installations ou du conducteur, un rail cassé, la pluie, le beau temps, la dilatation due à la chaleur ou au froid, une avarie matériel, ou un d'entre vous qui aura décidé de faire ch… une dernière fois en se suicidant sur le train, choisissez vous-mêmes moi je m'en fiche, nous contraint à supprimer tous les trains jusqu'à nouvel ordre, ça vous fera les pieds. Pour les moins courageux d'entre vous, et ils sont nombreux, la prochaine bétaillère de substitution finira bien par se pointer sur le quai d'en face, ne traversez pas les voies, on sait jamais, si le conducteur est joueur… En attendant, occupez-vous comme vous pouvez, je vous rappelle qu'il est interdit de fumer dans toute l'enceinte de cette gare, y compris les quais, mais c'est pas cette annonce qui en découragera certains de cracher leur fumée nocive à la tronche des autres, c'est pas mon problème, moi je suis pas sur le quai avec vous. Allez, bonne journée quand même, les nazes…"
Morte de rire, il est en forme, le zouave. Peut-être qu'il est venu en train ? (rire intérieur) Malgré tout, faudrait qu'ils pensent à nous en mettre un, de train, là ça s'accumule violemment, sur le quai. Ah oui, il a dit le quai d'en face. Je traverserais bien comme ces d'jeun's, mais la marche est trop haute, quel est le passage le plus accessible ?
P…, mais ils se pousseraient pas, ces gnous, moi aussi je veux pouvoir monter dans la bétaillère ! Ah oui, la p'tite flèche par terre, donc quelques pas plus loin il devrait y avoir la porte. Quoique, avec le bol que j'ai… Ben, qu'est-ce qu'ils ont tous à s'agiter ? D'accord, ça clignote sur le panneau, le v'là enfin. Et allez, passez-moi devant, bande de… C'est pas possible, après ils se demanderont pourquoi on fait tous la gueule, dans ce pays de m…
Mais laissez descendre, tas d'handicapés du neurone, sinon les autres qui veulent descendre vont y mettre des plombes, et ça va sonner la fermeture des portes avant qu'on ait pu monter ! Allez, dépêche-toi de sauter de la rame, t'attends quand même pas qu'il te ramène chez toi dès maintenant ? Pas possible, ça…
Holà, le mouvement de foule venu de derrière ! Je soulève les jambes et me laisse porter, faut juste que j'évite le poteau central… Vous pouvez arrêter, je suis dedans. Attention l'assaut final, dès que ça va sonner ! C'est bon, ça rentre plus, n'insiste pas et reste sur le quai, la bétaillère est pleine.
Mais fous-le dehors, il empêche la fermeture de la porte, avec sa valoche, encore un qui se la joue touriste, avec sa remorque à roulette juste là pour qu'on se prenne les pattes dedans, casse-c… Voilà, tire sur la porte. Il veut ma photo, l'autre-là ?
C'est quand tu veux, le chauffeur, on voit que tu t'en fous, que t'es assis et payé, quoi qu'il arrive… Ah, quand même, la bétaillère se décide. On n'allait pas descendre et pousser !
Héé ! Il fait quoi dans mon dos, lui ? Il pouvait pas le sortir avant, son téléphone ? Il se caresse pas au passage, au moins ? Et là, ils peuvent pas se serrer un peu ? Ah non, y'a un mioche au milieu. Va lui falloir un tuba pour respirer, le gosse. Quoique, avec l'aisselle du barbu, y'a pas que lui qui va tomber… Ca fait six mois qu'il s'est pas lavé, pour puer comme ça dès le matin, lui ?
Trilili, tzim-boum tzim-boum, ça commence… Ouais, allô aussi. Ben tiens, t'es dans le train, on n'avait pas remarqué, vu comment tu gueules dans ton bigo. Tu diras, c'est pas pire que la musique, que dis-je, le bruit de dégénérés qu'écoute la pouffe d'à-côté, c'est à se demander à quoi lui sert le casque, vu comment on l'entend. C'est sa tête qui doit faire caisse de résonnance…
Voilà, avec tous ces bœufs qui soufflent des naseaux, les vitres sont embuées, va-t-en profiter du paysage, même s'il n'y avait rien à voir. Y'a plus que leurs tronches… A propos de tronches, pourquoi elle a l'air plutôt contente, celle-là dans le coin ?
"Votre attention s'il-vous-plaît, notre train marquera exceptionnellement l'arrêt dans la prochaine gare". Si ça pouvait descendre… Héé, mais il a besoin de commencer à descendre avant l'arrêt ? Il pouvait pas rester sur son siège de privilégié, il a peur de pas pouvoir sortir ? Tiens, il s'est pris un croche-patte, bien fait pour sa gueule…
Ah, de l'air, ça fait du bien. Commençait à sentir le fauve, ici ! Ah non, ils vont pas tenter de monter, ça va pas, vous voyez bien que c'est complet… Et l'autre dans le coin, qui continue à sourire, elle aime ça, ou quoi ??
Et vas-y que je te pousse tout le monde pour monter… C'était à qui, ce pied ? Ouais ouais, "aïe", ça y est j'ai ma réponse. Ca t'apprendra à te caresser dans mon dos. Ah non, c'est pas lui, c'est çui d'à-côté. Bof, dommage collatéral. Piétine-le aussi, et on sera quittes…
Oh, celle dans le coin a hérité d'une autre qui a l'air aussi contente qu'elle. Ca doit être une secte… Sont quand même collées l'une contre l'autre, quasiment à touche-téton. Je ne supporte déjà pas l'aisselle à l'autre crasseux… M'intriguent quand même, les deux enrôlées de la secte. Je suppose qu'elles se connaissent, pourtant elles ne se parlent pas. Voilà, j'ai trouvé mon occupation dans la bétaillère. Les regarder…
Une telle proximité, c'est quand même gênant, faut pas que l'une refoule du bec ! Ca n'a pas l'air de leur poser problème. Mais c'est quand même bizarre. Moi, collée comme ça, ou alors faudrait que ce soit un beau mâle, et encore ! Et puis, où t'as vu un beau mâle, dans ce troupeau ?? Je comprends pas comment on peut prendre sur soi à ce point, affluence ou pas.
Attends, j'ai rêvé, ou quoi ? Elles viennent pas de se faire un bisou, là ? Ben si, elles viennent de recommencer, même. P…, c'est dég… Non mais y'a plus de doute, vu comment elles se regardent. Un couple de brouteuses, dire que j'ai ça dans mon angle de vision. Encore, deux mecs, m'en foutrais, c'est juste du gâchis, mais ça… Bêêrk !! Celle du coin qui ferme les yeux et ouvre la bouche… Elle attend la becquée ?
Y'a que moi que ça interpelle ? Faut croire, les autres bovins avec leurs regards vides regardent dans toutes les directions, sauf la leur. J'avoue que ça me …surprend, qu'une femme puisse ainsi… une autre femme, re-bêêrk, moi je pourrais pas. Pourtant, elle a l'air de ne pas trouver ça aussi dég… que moi, que l'autre lui colle sa bouche. Au moins, ça doit pas piquer, avec une femme ! (rire intérieur)
N'empêche, je suis en train de les mater en train de faire leurs cochonneries, les deux gougnottes, c'est de la curiosité malsaine… C'est dingue, elles ont pourtant l'air normales, j'veux dire qu'elles ressemblent à des femmes, aucune qu'on puisse confondre avec un type, j'm'explique pas. C'est pas flagrant de savoir laquelle fait l'homme, dans leur couple. Peut-être la deuxième, celle qui met la langue…
Elles ont l'air de s'occuper agréablement, pourtant. Ca change des autres et de leurs tronches de dix mètres de long. Après tout, si ça leur plaît, c'est leur problème, pas le mien… C'est qu'elles y vont à cœur-joie, il est sans doute récent, leur couple. Est-ce que ça marche comme pour nous ? C'est quand même bien tendre, entre elles, ça reste dég…, mais pour celles qui aiment. Ca me ferait presque envie, mais avec un mec, mais faut trouver un mec qui y mette autant de douceur. C'est normal qu'une femme comprenne mieux les attentes d'une femme qu'un mec. Mais qu'est-ce que je suis en train de penser, moi ? Re-re-bêêrk !!
Tiens, on marque l'arrêt ? J'étais tellement au spectacle avec les deux lécheuses, que je ne m'en étais même pas aperçue. Elles se sont déplacées, elles sont plus loin des portes, et moi aussi, avec l'autre infection qui est descendu. Maintenant je ne vois plus que le visage de celle qui était dans le coin, plus l'autre. Là c'est flagrant qu'elle aime ça, elle a les joues rouges, et je distingue même le sang qui bat dans son cou ! Tantôt elle ferme les yeux, tantôt elle a l'air de fixer sa …femme, qui la plaque contre la paroi, sans lâcher sa bouche. Elles sont dans leur bulle, les deux bouffeuses de chattes, ça devient chaud !
Oh, y'a un truc qui a l'air de lui déplaire… Ah non, elle sourit. Elle essaie sans conviction de repousser l'autre, se tortille légèrement. Entre deux bisous, elle remue. L'autre aussi, et elle se baisse légèrement, la titille dans le cou, puis remonte. Celle qui était dans le coin a rougi davantage, mais ne s'arrête pas. Si je ne savais me tenir, je me déplacerais un peu, histoire de voir…
J'ai vu, au détour d'un aiguillage qui a secoué la rame, et fait bouger le type devant moi. J'ai vu, et dû rougir moi aussi, de ce que j'ai vu. Je comprends mieux la réaction ! Celle qui doit faire l'homme a osé un truc… Comment je réagirais, moi, si un type me baissait le slip à mi-cuisses, dans un lieu public ? Elle, elle poursuit son échange de langues. L'amour fait accepter de ces trucs ! L'amour ?? Comment appeler ça autrement, même si c'est bêêrk ?? Elles doivent se kiffer sacrément, quand même. J'en serais presque jalouse, de les voir ainsi, entre les tronches de cake des autres…
Y'a vraiment que moi qui les vois ?? Les autres bovidés seraient à ce point lobotomisés, ou quoi ? Je ne la rêve quand même pas, la femme avec sa jupe plissée, son slip baissé, et les mains de sa copine sur ses fesses ?? Elles se brouteraient là, qu'il y en aurait encore qui les ignoreraient, ou… ?? Hallucinant !
Nouvel arrêt, nouvelle transhumance. Je suis obligée de me pousser, je les perds de vue le temps de la manœuvre. Dans le carré à l'extrémité, la mamie au chariot est partie, et les deux se sont rapprochées de la place. Celle aux mains baladeuses invite l'autre à s'y asseoir. Devant elle, un type est plongé dans son livre électronique. Est-il même capable de donner la couleur des chaussettes ou des mocassins de la lesbo ?
Il ne prête même pas attention, lorsque jambes serrées, elle ôte complètement le sous-vêtement de coton blanc, et le tend, soigneusement plié, à sa compagne, qui le fourre comme pochette dans son chemisier. Faut vraiment être amoureuse pour accepter de faire un truc comme ça ! Quelque part, j'admire ce qu'il y a entre elles, j'acquiesce pas, mais j'admire. C'est bêêrk mais c'est fort ! Est-ce que j'ai déjà aimé ou été aimée comme ça ? J'ai beau chercher…
Je sors de mes pensées, et reprends mon observation en milieu naturel, enfin je m'entends. Celle assise a croisé les jambes, et posé la tête contre le ventre de l'autre, qui lui caresse les cheveux. Je replonge dans mes pensées, cette femme a trouvé, même si c'est auprès d'une autre femme, une forme de plénitude qui fait chaud à voir, je dois reconnaître que pour s'offrir ainsi faut être accro. Elles ont du cran, les deux-là, d'oser vivre leur passion au grand jour…
Une sonnerie me ramènera à la réalité, par la vitre de la porte refermée, je les aperçois sur le quai, main dans la main, tandis que le train se remet en marche. Tiens, j'ai les tétons qui dardent ?? »


Mylène (MyLzz59)
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