Mylène écrit (http://mylene-ecrit.blogspot.fr)
 ( MàJ: 02/01/2014 )


Ceci est un Blog par Mylène (MyLzz59)

Je Roule Toute Seule... [Pres]

Nouvelle Année, Nouvelle Histoire.
Pas vraiment de rapport avec Noël, à peine une allusion, pour cet écrit en un chapitre, dont les deux protagonistes nocturnes sont une femme amoureuse, et sa luxueuse berline.
Non, il ne s'agit pas d'Alyx..


« Je roule toute seule dans ma voiture
Les arbres défilent à toute allure
Je tiens le volant serré dans mes doigts
Et c'est toi que je tiens dans mes bras
Car par la pensée tu es là..
»
(Sheila, 1976 - Comp: M.Tassy, C.Carrère, V.Buggy)




Je Roule Toute Seule... [Ch.01]

« Je roule toute seule dans ma voiture, comme dans cette chanson sans prétention de l'un des plus beaux albums que je connaisse, cependant pas d'arbre qui défile dans les faisceaux blancs de mes phares, juste les bandes de chaque côté de ma voie qui s'illuminent à mon passage puis s'éteignent, magie du xénon.

Il doit être un peu plus de deux heures du matin, de la nuit devrait-on dire, c'est affiché quelque part sur l'un des écrans de bord, tout comme la température intérieure à chaque place de l'habitacle, et même l'hygrométrie moyenne, cette foule de détails non vitaux dont on truffe les véhicules dits de luxe, peu m'importe. Il doit être un peu plus de deux heures du matin, je fais partie des rares automobilistes à circuler encore sur ce long ruban d'asphalte qui s'étire bien au-delà de la portée de mes phares.

Je baisse d'un cran le volume sonore de cet impressionnant système audio afin de mieux apprécier ce blu-ray des plus belles interprétations de "nachtmusik", la fidélité de la restitution des nombreux haut-parleurs me donne la sensation d'avoir les membres de l'orchestre comme passagers.

Mais ce qui attire mon regard sur cet écran au centre de la planche de bord, sur lequel je jette des coups d'oeil furtifs lorsque la route me le permet, c'est ce cadre en incrustation en bas à droite, ce cadre en forme de coeur, avec ton si joli minois dedans, toi mon amour, ma compagne, la plus belle des étoiles de ce véhicule. Je souris, je te souris, tu es encore loin de moi, et pourtant par cette image si près, toi vers qui je roule, toi que je rejoins à l'issue de mon périple, toi qui ne m'attends pas, déjà sans doute profondément endormie sous ta couette, ma compagne, mon amour.

Machinalement, je bouge les jambes l'une contre l'autre, change de position dans ce moelleux fauteuil. J'appuie sur le bouton qui fait ressortir le cale-dos, frissonne alors que la température est pourtant idéale dans mon cocon roulant vers toi, c'est l'effet que tu me fais, je t'aime.

La route désormais domine, et autour de moi s'étalent les lumières des patelins environnants, un paysage électrique un peu irréel, un peu féérique, qui titille mon côté romantique. En cet instant j'aurais aimé partager cette image avec toi, ma main ressent l'absence de la tienne sur laquelle elle aurait aimé se poser. A défaut elle se rabattra sur le pommeau de la console centrale, au vernis impeccable mais froid. Je songe aux gens dans ces patelins. Dorment-ils, tout comme toi ? Ensemble tout comme nous tout à l'heure quand je t'aurai rejointe ? La fée électricité fait scintiller ces milliers de points lointains comme une gigantesque guirlande jaune orangée. Noël.. Difficile d'organiser quoi que ce soit lorsque l'on ne connaît pas son emploi du temps à l'avance, mais j'aimerais que nous puissions partir ensemble, toi et moi, mon amour, passer une inoubliable fin d'année je-ne-sais encore où.. Chaque chose en son temps, nous n'y sommes pas encore, actuellement chaque kilomètre nocturne qu'avale en musique ma berline me rapproche de toi.

Les lumières des patelins appartiennent maintenant à un proche passé, tout comme les étoiles dans le ciel, c'est mauvais signe. Je distingue à peine celle du bout du capot, en contre-jour dans la lumière des phares.. Puis la voiture se met à ralentir, elle a détecté la pluie qui s'est invitée à mon concert classique en blu-ray, le régulateur se cale sur la limitation de vitesse adéquate, il veille sur moi. Pourvu que ce passage ne dure, car il augmente mon temps de parcours, il t'éloigne de moi, ma compagne, mon amour.

Sur le pare-brise se livre un sérieux combat, celui du balai contre l'envahisseur liquide qui tombe du ciel, cet envahisseur qui sur le toit ajoute son clapotis, atténué par l'isolation, aux instruments des musiciens qui me tiennent compagnie, cet envahisseur qui à la lueur des phares crée des silhouettes fantômatiques qui s'évanouissent dès que le capot les enfonce.

Les feux de détresse s'allument, me voici à soixante à l'heure, nous traversons, ma berline, les musiciens et moi, un véritable mur d'eau, une pluie d'orage sans orage, et je ne puis me fier pour continuer d'avancer qu'à l'image monochrome de la route qui a remplacé celle des compteurs, derrière le volant. Je me sens aux commandes d'un avion, plus d'une voiture..

L'averse se calme, les compteurs réapparaissent, le balai termine de chasser les coulées sur le pare-brise, il se déplie, se rétracte, se contorsionne afin de déloger l'eau dans les moindres recoins. Au loin en sens inverse approchent des lueurs bleues, il est de ces moments où je me sens reconnaissante envers l'électronique de ma berline.

Je pense aussi à la destination de ces gyrophares, à celui ou celle dont le trajet nocturne aura pris une funeste tournure, qui était peut-être attendu, à cette personne quelque part, qui verra ses projets avortés. Je pense aussi à toi, ma compagne, mon amour, je pense à te rejoindre sains et sauve. Le moteur accélère, le régulateur se recale, je soupire et fais abstraction de mes dernières pensées, à l'exception de toi, mon amour, ma compagne.

Le concert se termine, et après une page de publicités la radio d'autoroute m'informe que l'accident est en cours de nettoyage, qu'il survient trop bêtement, lorsqu'on ne respecte pas les conseils élémentaires de prudence. Je t'envoie un baiser, toi qui me souris dans ton cadre, mon amour, ma compagne.

J'adresse aussi un baiser à la croix en chapelet accrochée au rétroviseur intérieur. Je sais que tu ne comprends pas pourquoi je m'acharne à croire, malgré tout ce battage médiatique qui depuis des mois nous relègue au ban de cette religion. Je me fiche de ces humains, ils ne sont que des humains. Je ne crois pas en eux, ils étaient censés être des guides, et j'ai bien plus confiance en mon GPS qu'en eux. Comme mon GPS, c'est cette croix qui me guide.

J'éjecte le blu-ray, le remets dans le chargeur attenant à la trappe à lunettes, en sors un autre au hasard. Je l'enquille, appuie sur le bouton "OK", et un ténor prend place dans le fauteuil passager. La musique démarre, je m'engage dans l'embranchement de gauche, le ténor me laisse finir ma manoeuvre avant de se lancer magistralement. Si j'en crois le GPS, j'arriverai chez toi, mon amour, ma compagne, avant la fin de son concert.

Une zone de travaux, un panneau m'informe de l'absence de marquage sur les prochains kilomètres. Je repousse le levier du régulateur, allume les feux de route afin de distinguer le paysage. A côté du xénon, cet éclairage utile me semble bien jaune. La berline entre dans une sorte de tunnel, est-ce une route en construction qui nous surplombe ? Alors que les feux de route restent droits, les xénon dessinent sur les parois des arceaux, comme dans cette série où les personnages voyagent dans le temps. Je souris. Si j'avais un moyen de raccourcir les durées loin de toi, ma compagne, mon amour..

Un crétin dans une belle berline d'une autre marque me dépasse à une vitesse frisant l'indécence. Il espère peut-être que je vais le défier. Très peu pour moi, même si mon moteur est capable de rivaliser avec le sien. J'éteins juste mes feux de route en secouant négativement la tête. En peu de temps il est déjà loin devant moi. Pas de quoi perturber le ténor dans le fauteuil passager.

Un peu plus tard, au péage, j'apercevrai la berline du crétin, garée près d'une fourgonnette sérigraphiée "gendarmerie". Une once de justice en ce bas-monde. Ticket, carte bancaire, bouton de demande de reçu, la barrière se lève. Plus que deux kilomètres avant la première sortie, cette sortie qui mène vers toi, toi, mon amour, ma compagne, mon objectif, ma destination.

Clignotant, changement de vitesse maximale au régulateur, et entrée en scène du GPS, je le laisse me guider. Dans moins d'une demi-heure je garerai ma berline dans ton allée, ouvrirai ta porte avec la clé que tu m'as offerte, déposerai mon bagage puis mes vêtements, ferai un brin de toilette dans la plus grande discrétion, puis me faufilerai sous ta couette tandis que tu feindras d'être encore endormie, t'embrasserai amoureusement à cet endroit le plus intime de toi et que tu n'ouvres qu'à moi, puis remonterai m'allonger à ton côté. Toi, ma compagne, mon amour, tu te tourneras, m'enlaceras de ton bras et de ta jambe, et nous nous endormirons ainsi, ta tête au creux de mon épaule.

Je resterai prudente jusqu'à destination malgré ma hâte grandissante d'arriver. Je t'aime.
»

-MyLzz59-

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